Le Populisme
Pascal Perrineau
Que sais-je ? (2021)
Les trois premiers chapitres sont un exercice de style sur un de ces faux sujets qui font diversion, et division (identité, wokisme, écriture inclusive, etc.), réduisant la politique au sur-place : le populisme est une insulte que les dominants jettent à la figure de leurs opposants pour les discréditer.
Mais le quatrième recentre la discussion sur la mort de la démocratie dans nos républiques qui se paient de mots et se voilent la face, réduites au panem et circenses pour conserver les pouvoirs en place.
Quelques extraits :
Chapitre premier — la nature du phénomène
II. L’approche idéelle
7. Qu’est-ce que les élites ?
p. 29
[Les populistes] véhiculent une conception moniste des élites, où ceux qui sont situés en haut des hiérarchies politiques, administratives, économiques, sociales ou culturelles appartiennent à un même milieu qui travaille constamment contre la volonté générale du peuple et défend étroitement ses intérêts propres.
Chapitre III — les ressorts du phénomène populiste
I. Le malaise économique postindustriel
pp. 74-75
Les capitalismes industriels à forte régulation étatique avaient accouché d’une société de classes homogènes qui suscitaient des sentiments d’appartenance durable à des milieux sociaux (la classe ouvrière, la paysannerie, la bourgeoisie), des idéologies (la droite, la gauche), des familles politiques (le parti communiste, la social-démocratie, la démocratie chrétienne, le bloc conservateur). Ce monde où de fortes allégeances se reproduisaient, est mort.
IV. Le rejet de l’immigration
pp. 83-84
En ce qui concerne les demandes d’asile, l’Allemagne constitue l’une des destinations les plus recherchées (220 000 demandes à la fin août 2015) devant la Hongrie (96 350 demandes à la fin juillet). À l’époque, cette forte pression a propulsé la Hongrie au premier rang des pays accueilllant des réfugiés quand leur nombre est rapporté à la population (665 réfugiés pour 100 000 habitants), devant l’Autriche, la Suède et l’Allemagne (190 pour 100 000) et loin devant la France ou le Royaume-Uni (23 pour 100 000).
Chapitre IV — L’avenir : le populisme et la question démocratique
p. 108
C’est à partir des années 1980 et du déclenchement de la crise économique et sociale, liée aux chocs pétroliers des années 1970, que les premiers signes de fatigue démocratique vont se manifester : montée des abstentions lors des élections, premiers succès des partis protestataires, dégradation de l’image de la politique.
p. 109
La démocratie semble en détresse, et certains considèrent même que l’Europe a vécu son « moment démocratique » et qu’elle se trouve à présent dans une phase de « post-démocratie ».
I. La faiblesse de l’hypothèse démocratique
p. 109
La démocratie représentative telle qu’elle a été inventée au moment de la Révolution française et réinventée après la Seconde Guerre Mondiale est fondée sur trois fictions : celle de l’égalité entre les citoyens considérés comme égaux en dépit de leurs différences, celle de la souveraineté populaire où il s’agit d’associer les gouvernés à l’action de gouverner par la seule désignation des gouvernants, celle de la représentativité du délégué élu qui, au-delà de la représentation de la volonté du peuple, acquiert une autonomie certaine par rapport à la base qui l’a élu.
III. Les effets pervers du culte démocratique
p. 116
La tenue d’élections fausse toute analyse : pour peu qu’un pays organise un scrutin, Washington et le reste du monde font preuve d’une grande mansuétude à l’égard du gouvernement sorti des urnes, quel que soit, dans les faits, son comportement.
V. Populisme et gouvernance
pp. 118-119
La gouvernance fait la paire avec le populisme. Le populisme sur le terrain de la masse des électeurs, la gouvernance pour le petit nombre de ceux qui décident des orientations économiques, sociales et politiques.