Mathilde Ollivier: “La France a trop délaissé ses services publics à l’étranger”

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Ecologie, santé, représentation locale, tels ont été les thèmes abordés par Mathilde Ollivier, candidate d’Europe Ecologie les Verts pour les prochaines sénatoriales 2023.

Conseillère des Français de l’étranger, Mathilde Ollivier, est cheffe de file pour Europe Ecologie les Verts dans la lice aux sièges des sénateurs des Français de l’étranger. Les Sénatoriales 2023 remettent en jeu six des douze sièges des sénateurs établis hors de France. Présentation de la candidate Mathilde Ollivier.

Pourquoi souhaitez-vous vous présenter aux prochaines Sénatoriales ?

Je suis originaire d’une région magnifique, qui connaît bien les contradictions entre beauté naturelle et excès des activités humaines : la Bretagne. Mon engagement commence avec les marches pour le climat. Comme de nombreux jeunes de ma génération, j’ai envie de changer les choses et c’est pour cela que j’ai pris mes responsabilités et me présente à ces élections. 

Toutes les semaines, je reçois des sollicitations qui me démontrent que la France a trop délaissé ses services publics à l’étranger.

Allemagne, Belgique, Autriche… cela fait maintenant une dizaine d’années, depuis mes 19 ans, que je réside à l’étranger. Je suis installée à Vienne, ville cosmopolite, en couple binational franco-iranien. C’est pour moi une grande richesse, en tant que Française de l’étranger, que de faire l’expérience de la multiculturalité et de m’enrichir des échanges avec des amis et familles aux parcours de vie tous très différents.

Nos compatriotes à l’étranger sont aux premières loges des dérèglements climatiques.

Élue consulaire et à l’Assemblée des Français de l’étranger, je connais et partage les spécificités et les problèmes de nos compatriotes qui résident en dehors du territoire national que ce soit pour refaire leur carte d’identité, accéder aux offres culturelles françaises ou francophones, ou encore scolariser leurs enfants dans nos écoles et lycées. L’Etat fait de plus en plus défaut dans l’accompagnement des Françaises et Français les plus vulnérables et dont la situation se dégrade entre inflation galopante et instabilités géopolitiques dans de nombreuses régions du monde. Toutes les semaines, je reçois des sollicitations qui me démontrent que la France a trop délaissé ses services publics à l’étranger. Et l’actuel gouvernement continue à accélérer le retrait du soutien à nos compatriotes. Cela ne peut plus durer. 

Les températures augmentent, les océans se réchauffent, les glaciers fondent. Il est temps d’agir, de nous unir et de prendre des mesures courageuses pour préserver notre environnement.  

A l’image de ma génération et de tant d’élus et de citoyens à l’étranger, je veux que l’écologie politique et la solidarité soient plus présentes dans nos institutions. Le Sénat, même dominé par une majorité conservatrice, ne doit pas faire exception. Nos compatriotes à l’étranger sont aux premières loges des dérèglements climatiques. À l’heure où le rapport du GIEC indique que 3,5 milliards de personnes sont vulnérables au changement climatique sur notre planète, il est de notre responsabilité de porter un autre modèle pour répondre aux urgences environnementales, sociales et démocratiques, ce que se refuse à faire le gouvernement actuel. Les températures augmentent, les océans se réchauffent, les glaciers fondent. Il est temps d’agir, de nous unir et de prendre des mesures courageuses pour préserver notre environnement. Face à l’urgence, nous nous devons de garantir un futur souhaitable pour ma génération et les suivantes. 

Sous quelle étiquette vous présentez-vous ?

Je suis cheffe de file d’Europe Écologie les Verts et nous œuvrons actuellement, avec l’ensemble des forces politiques à gauche, à nous rassembler pour maximiser le nombre de sièges au Sénat. Les élus consulaires connaissent l’importance d’avoir des sénateurs et sénatrices à leur écoute, indépendamment de leurs sensibilités. Ce sont des élus de terrain qui font preuve d’un engagement constant, souvent confrontés à des situations difficiles. C’est leur voix que je souhaite porter au Sénat pour que les Françaises et Français de l’Étranger, cette communauté solidaire et diverse, soit mieux reconnue et accompagnée.  

Vous sentez-vous proche des Français vivant à l’étranger ?

Absolument ! Mon parcours universitaire et professionnel est similaire à celui de beaucoup de Françaises et Français établis hors de France : je suis partie étudier entre la France et l’Allemagne, ai effectué des stages et des séjours aux États-Unis et en Autriche, j’ai aussi été assistante de langue en Allemagne et intervenante dans l’association FLAM de Vienne pendant mes études. Je suis engagée dans le bureau de Français du Monde ADFE Vienne, avec lequel nous avons de nombreux projets culturels, festifs, mémoriels relancés après deux années Covid difficiles. J’ai commencé ma carrière professionnelle à Bruxelles, travaillant sur les politiques européennes, avant de déménager à Vienne, où je travaille toujours sur les programmes de l’Union européenne en matière de recherche et de santé publique. 

Je suis d’ailleurs fière qu’Europe Ecologie – Les Verts porte cette réflexion avec la proposition de sécurité sociale écologique portée par notre sénatrice des Français de l’étranger Mélanie Vogel.

La santé est d’ailleurs aussi l’un des sujets centraux pour les Françaises et Français de l’étranger. Accès et remboursement de soins, cotisations et avenir de la Caisse des Français de l’Étranger, prévention des maladies et possibilité de bénéficier de traitements et d’un personnel médical de qualité, possibilité d’être traité en France… Ce sont autant de sujets sur lesquels il est important de soutenir nos compatriotes à l’étranger et notamment les individus les plus vulnérables dont nos aînés et les personnes en situation de handicap. C’est aussi un sujet de société plus global sur lequel je souhaite m’engager si je suis élue : en France, actuellement, moins de 2% des dépenses de santé sont dirigées vers la prévention, ce qui est bien en deçà de la moyenne européenne. Nous n’avons pas assez tiré les conséquences de la pandémie. Elle a été vite oubliée alors que ses effets se font toujours sentir sur nos systèmes de santé. Je suis d’ailleurs fière qu’Europe Ecologie – Les Verts porte cette réflexion avec la proposition de sécurité sociale écologique portée par notre sénatrice des Français de l’étranger Mélanie Vogel ou avec le travail actuel des députés écologistes sur les polluants éternels menaçant notre santé.

Les Français expatriés peuvent se sentir, à tort ou à raison, parfois oubliés par l’Etat français. Quel est votre sentiment ?

Les Françaises et Français de l’étranger sont en effet moins considérés par l’Etat et les derniers gouvernements qui se sont succédés ont fortement réduit les budgets consacrés à ceux qui résident hors de France et y portent les valeurs de notre culture et de la République. Entre 2017 et 2023, le budget consacré aux Français de l’étranger et aux services consulaires n’a cessé de baisser. Le programme 151 par exemple, qui porte les crédits destinés à fournir un certain nombre de services aux Français établis ou de passage hors de France a été le programme le plus fortement mis à contribution en matière de réduction des effectifs du ministère de l’Europe et des affaires étrangères. En effet, dans le cadre du programme « Action Publique 2022 » un rapport sénatorial décompte la suppression de 107 postes sur 332 au total, alors même que la crise du COVID a montré le rôle déterminant des agents des consulats pour soutenir et conseiller les Françaises et Français de l’étranger pendant la pandémie. 

Pour soutenir les Français de l’étranger, il est important d’avoir aussi une représentation locale plus forte.

Cette réduction de l’engagement de l’Etat est visible sur bien d’autres aspects comme le désengagement dans le réseau éducatif, déboussolé par l’objectif obscur “cap 2030”, le manque de soutien aux associations FLAM et aux réseaux culturels, l’approche réductrice des programmes STAFE de subventions aux projets associatifs, ou encore l’injustice dans le calcul des retraites des Français de l’Étranger. Sur ce dernier point, nous ne pouvons que déplorer les priorités du gouvernement autour de supposées fraudes de retraités à l’étranger, alors que la grande majorité est avant tout victime d’un calcul injuste mainte et mainte fois souligné par les élus à l’AFE et les parlementaires de gauche.

Pour soutenir les Français de l’étranger, il est important d’avoir aussi une représentation locale plus forte et pour ce faire, les prérogatives des Conseillers et Conseillères des Français de l’étranger et des Conseillers à l’AFE doivent être renforcées. Il est nécessaire de permettre à ces élus de mieux jouer leur rôle d’alerte et de soutien à nos compatriotes, mais aussi de sortir de la seule tutelle du ministère des affaires étrangères alors que nos problématiques et sujets sont transversaux et concernent de nombreux ministères. 

Quels sont les principaux défis des Français de l’étranger ?

Éducation, Retraites, Citoyenneté : la représentation des Françaises et Français de l’étranger est un modèle unique que nous nous devons de continuer à développer, pour permettre une meilleure représentation des spécificités de nos compatriotes. Il faut aussi trouver des moyens de mieux soutenir nos entrepreneuses et entrepreneurs en démarche éco-responsable à l’étranger. Ils sont, souvent, pionniers dans ce domaine dans leurs pays de résidence. 

La pandémie a mis un coup d’arrêt à ce monde associatif à l’étranger pendant plusieurs années et il est important de garder et recréer du lien et de soutenir les bénévoles qui, partout, s’engagent.

Les Français de l’étranger sont aussi en prise aux mêmes problématiques que leurs amis et familles en France : quelle société souhaitons-nous construire pour demain, face aux constats du changement climatique et de l’effondrement de la biodiversité, du creusement des inégalités, et de la perte de confiance globale envers les institutions et la sphère politique ? C’est aussi pour cela qu’il est important de porter une nouvelle génération au Parlement et de prôner le renouvellement, la féminisation et la diversité de nos représentants politiques, en particulier dans une institution comme le Sénat.

Les associations structurent les communautés françaises à l’étranger. Elles sont un point de repère pour les personnes à peine installées, tout autant qu’un moyen de garder un lien avec la France pour celles et ceux qui résident depuis longtemps dans leur pays d’accueil. La pandémie a mis un coup d’arrêt à ce monde associatif à l’étranger pendant plusieurs années et il est important de garder et recréer du lien et de soutenir les bénévoles qui, partout, s’engagent.

Comment voyez-vous le rôle de sénateur ?

Depuis mon élection en tant que Conseillère en 2021, je connais le rôle essentiel que jouent nos sénateurs et sénatrices pour se faire les relais des problématiques que nous rencontrons dans nos mandats d’élus de terrain. D’interventions pour débloquer un dossier administratif au dépôt d’amendements pour résoudre les nombreuses injustices rencontrées par les Français résidant hors de France qui veulent toucher leurs retraites : le travail collectif entre parlementaires et élus consulaires est absolument nécessaire. Parce que je connais leur engagement quotidien et leur connaissance pointue des sujets touchant la communauté française, ma volonté est de continuer de m’appuyer au Sénat sur les expertises et les réflexions de mes collègues Conseillères et Conseillers. 

C’est aussi se faire l’écho des femmes, des minorités, des personnes vulnérables dont les droits sont parfois réduits dans leur pays de résidence. 

Sur notre circonscription des Français établis hors de France, à l’heure de la guerre en Ukraine et des débats sur la loi immigration, nos sénatrices et sénateurs portent aussi la responsabilité de défense de nos valeurs de démocratie, de paix, de solidarité, et d’échanges entre les peuples. Représenter les Français à l’étranger, c’est porter notre vision de citoyens du monde et utiliser cette richesse d’expériences et de vécus pour alimenter nos lois et nos politiques. C’est aussi se faire l’écho des femmes, des minorités, des personnes vulnérables dont les droits sont parfois réduits dans leur pays de résidence. Cela implique aussi d’être capable d’aller chercher des compromis et de travailler, quand c’est possible, par-delà les chapelles politiques pour faire avancer nos droits. 

Il nous faut travailler à repenser nos modèles économiques et de consommation, à encourager la transition vers une agriculture durable et à protéger les écosystèmes fragiles. 

Si je suis élue en septembre prochain, je porterai la responsabilité de la représentation de ma génération qui, à l’étranger comme en France, s’éloigne des institutions et ne trouve pas de réponses politiques à la hauteur des enjeux pour lui garantir un avenir désirable sur une planète habitable. Alors être sénatrice écologiste, c’est porter un message d’urgence et d’espoir. C’est aussi s’engager aux côtés des collectifs citoyens, des mouvements climat et des écologistes qui se lèvent face à l’immobilisme du vieux monde. C’est porter des mesures concrètes pour préserver la biodiversité, promouvoir les énergies renouvelables, réduire la pollution et recréer des modes de vie durables et sobres. Il nous faut travailler à repenser nos modèles économiques et de consommation, à encourager la transition vers une agriculture durable et à protéger les écosystèmes fragiles. Notre programme se veut collectif et doit dépasser les mouvements politiques pour transformer notre modèle et ainsi passer d’un système d’exploitation à une société du partage où chacune et chacun peut vivre dignement, en bonne santé et dans un environnement sain.